Des rives de la Méditerranée à l'Orient, de la Turquie aux sources du Gange, en suivant d'anciennes routes commerciales, parcourues par les caravanes depuis plusieurs millénaires, c'est, autant que possible, à pied que Matthieu et Françoise dérouleront un long chemin. En 2016, le premier mouvement de cette aventure les a conduits d'Istanbul à Téhéran en traversant l'Anatolie, les rivages de la Mer Noire, la Géorgie et l'Arménie. Fin août 2017, repartant de Téhéran, ils gagnent la Mer Caspienne ; puis après un transit rapide du Turkménistan, ils rejoignent l'Ouzbekistan, Boukhara, Samarkand, traversent la Ferghana puis atteignent fin novembre 2017 Bishkek, la capitale kirghize. Début septembre 2018, ils quitteront Och au Kirghizstan pour Irkeshtam d'où ils pénétreront en Chine ; puis après la traversée de la Kunjerab Pass, ils enteront au Pakistan, puis atteindront l'Inde et continueront vers Haridwar, but de leur périple.

vendredi 21 octobre 2016

La route en Arménie sous les caprices de la météo

En partant de France, nous n'avions pas réalisé que la traversée de l'Arménie serait aussi longue. Petit pays certes, mais tout en montagnes, ravins, cols, ... Aux longues steppes désertiques succèdent de profondes gorges que nous franchissons par une suite sans fin d'épingles à cheveux.
Quittant Vedi le 7 octobre, nous entamons la montée à un premier col de 1700 m. Nous traversons quelques villages dont certains paraissent relativement florissants alors que d'autres donnent une image de paupérisation galopante.


Au cœur de l'après-midi, nous sommes happés par une charmante famille qui fêtait le retour d'Europe du père au milieu d'un cimetière où sont enterrés les héros locaux de la guerre du Haut Karabagh. L'alcool coule à flot mais nous déclinons poliment vodka et bière ;  le mouton a été tué, on nous en offre les meilleurs morceaux, bien bardés d'un gras épais ; salades, pommes de terre cuites dans la cendre, gâteaux, bonbons, .... C'est la fête ! Charles Aznavour, le Général de Gaule sous les ordres duquel un grand-père avait combattu, l'amitié franco-arménienne, Marseille, les arméniens d'Alep, etc., alimentent une conversation animée. Matthieu découvre les cigarettes Ararat, qui dans la meilleure tradition russe, développent leur arôme au travers d'un goûteux tube en carton.



Mais le jour avance, nous avons du chemin à faire. Nous prenons congé de nos hôtes et poursuivons notre montée jusqu'à poser notre tente face à un paysage grandiose, zone de pâturage pour les troupeaux. Que peuvent manger ces pauvres bêtes dans une steppe aussi sèche ?



Le lendemain, nous franchissons le col pour traverser ensuite une série de villages au milieu de vergers de pommiers. Les petits marchands le long de la route alourdissent généreusement nos sacs à dos. Croulant sous des kilos de pommes, nous finissons lâchement par éviter de croiser leurs regards.La deuxième nuit sous tente s'est passée dans un verger.
Nous rejoignons ensuite Yeghenazor puis Vaik, deux petites villes qui alignent des barres d'immeubles ternes, restes de l'époque soviétique. Peu d'animation dans ces bourgades.


Soleil éclatant, moral au beau fixe, nous partons bravement pour franchir le deuxième col important (col de Vorotan, 2300m). Nous sommes encore dans une zone de steppe. Au sommet du col, vent et froid. Deux paysans venus pour la journée vendre les produits de leur ferme nous invitent à partager leur pique-nique.




Et le lendemain matin, surprise : la neige était tombée, blanchissant les sommets environnants et frôlant la route devant notre chambre. Quelques beignets de pomme de terre, un café et nous décidons de reprendre la route sous un léger grésil. Le temps est bas, la route est humide, il commence sérieusement à tomber une neige mouillée qui nous gèle les mains. Nous échouons dans une station service en espérant que la situation va s'améliorer. Il nous est impossible de continuer à marcher. Le brouillard et la neige rendent la route trop dangereuse. Aussi nous gagnons Goris dans un taxi.



Goris est une charmante petite ville au creux d'une gorge boisée. Lorsque le soleil est là, les couleurs d'automne sont un vrai régal. Sur un des versants de la vallée se découpent des cheminées de fée. La falaise est truffée de grottes. Goris, anciennement la quatrième ville d'Armenie est proche du théâtre d'opération du Haut-Karabagh. Aussi la présence de mouvements de l'armée arménienne et de militaires en uniformes est visible dans toute l'agglomération. Si on compte officiellement 23000 habitants, la forte émigration, comme dans toute l'Arménie, a affecté la ville qui ne compterait plus maintenant que 10000 habitants. Nous avons été séduits par cette ancienne ville de garnison russe où les petites maisons de pierre et la présence de nombreux petits jardins lui donnent une couleur paisible, presque rurale.




Bénéficiant d'une fenêtre météo favorable, nous en avons profité pour visiter le monastère de Tatev au milieu d'un site fabuleux (voir l'article sur les églises arméniennes).

Deux jours plus tard, il fallait se rendre à l'évidence ; la météo n'était pas avec nous ! 10 cm de neige tombés pendant la nuit, des routes de montagnes étroites et escarpées, nous ne pouvions pas marcher et ne pouvions décidément pas rester à Goris, aussi charmante soit cette ville et confortable notre hôtel. Nous prenons un marshroutka pour descendre à Kapan.


Et le temps s'améliore légèrement, une petite pluie vient remplacer la neige. C'est supportable. La marche devient néanmoins plus fatigante car il est difficile de renouer avec nos pauses mollement allongés sur le sol. Donc nous marchons, atteignons Kadjaran après 10km de brouillard déprimant, repartons le lendemain et grimpons, grimpons, grimpons, ... Nous laissons le brouillard en dessous de nous, nous enchaînons les épingles à cheveux, sommes chaleureusement salués par les chauffeurs des camions iraniens, refusons les propositions de monter dans des voitures, et nous montons jusqu'à découvrir, surpris, que nous venons de franchir un col a 2535 m d'altitude.



Nous sommes à Meghri. Demain, 22 octobre, nous entrerons en Iran.

Matthieu et Françoise

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