Des rives de la Méditerranée à l'Orient, de la Turquie aux sources du Gange, en suivant d'anciennes routes commerciales, parcourues par les caravanes depuis plusieurs millénaires, c'est, autant que possible, à pied que Matthieu et Françoise dérouleront un long chemin. En 2016, le premier mouvement de cette aventure les a conduits d'Istanbul à Téhéran en traversant l'Anatolie, les rivages de la Mer Noire, la Géorgie et l'Arménie. Fin août 2017, repartant de Téhéran, ils gagnent la Mer Caspienne ; puis après un transit rapide du Turkménistan, ils rejoignent l'Ouzbekistan, Boukhara, Samarkand, traversent la Ferghana puis atteignent fin novembre 2017 Bishkek, la capitale kirghize. Début septembre 2018, ils quitteront Och au Kirghizstan pour Irkeshtam d'où ils pénétreront en Chine ; puis après la traversée de la Kunjerab Pass, ils enteront au Pakistan, puis atteindront l'Inde et continueront vers Haridwar, but de leur périple.

samedi 4 novembre 2017

Le grand Khorassan

Stratégiquement depuis l'époque achéménide, le grand khorasssan formait la partie la plus orientale de l'empire. Son territoire correspondait à l'est de l'Iran actuel, l'Afghanistan, les régions sud du Turkménistan, de l'Ouzbékistan et du Tadjikistan. Il était limité à l'est par l'Amou-Daria et les montagnes d'Afghanistan, à l'ouest par la mer Caspienne, au nord et au sud par des plaines arides et désertiques.

Carte du grand Khorassan d'aprés la Revue de Téhéran
C'est au temps de l'empire sassanide que toute cette région a été nommée Khorassan, soit le pays « d'où vient le soleil », Tuss et Nishapur en Iran, Mérv au Turkménistan, Samarcande et Boukhara en Ouzbékistan, Herat et Balkh en Afghanistan, Khoudjand et Panjakent au Tadjikistan, étaient à cette époque parmi les plus grandes villes de l'empire Perse.





Le Khorassan, par sa situation clé entre le monde occidental et persan et le monde indien et chinois a été un vecteur de diffusion de religions jusqu'à l'islamisation. Dès la période Achéménide la Perse a été un creuset d'idées qui a favorisé l'éclosion des grandes religions qui se sont propagées dans tout le monde antique. Citons en particulier le Zoroastrisme qui, forgé sur le mazdéisme, et dont l'origine s'est enrichie des rig védas en Inde.

Plan de temple du feu - région de Surkhandaria, Ouzbékistan (musée de Tachkent)
On retrouve par la suite des similitudes troublantes de ce mouvement religieux avec le Bouddhisme qui vient bien plus tardivement. Par exemple ces deux religions ont comme fondement en commun: la pensée juste, la parole juste, l'action juste...

Bouddha de Fayazstepa, Ouzbékistan (musée de Tachkent)

Et puis le Manichéisme synthèse du Zoroastrisme, du Christianisme et du Bouddhisme dont l'un de ses anciens adeptes a été Saint Augustin, Evêque d'Hippone et docteur de l'église.

, Ouzbékistan (musée de Tachkent)

Statue de Saint Augustin à Annaba, Algérie
Par ailleurs certains attribuent aux Manichéens d'avoir été à l'origine de la diffusion du mythe de Barlaam et Josaphat. On retrouve ainsi une véritable incarnation du Bouddha Shakiamuni ayant été sanctifié aussi bien chez les catholiques que chez les orthodoxes.
Ce phénomène extraordinaire fait partie de la Légende Dorée, oeuvre qui fait référence comme "who's who" des saints.

Mevlana Rumi qui a séjourné à Nishapur chez Farid ad Din Attar est également originaire du grand Khorassan puisqu'il est né à Balkch (au nord de l'actuel Afghanistan). Notons que toute sa poésie a toujours été rédigée en Persan.

Un autre grand penseur, Al Ghazali, grand mystique rattaché au soufisme, a inspiré toutes les religions du livre et des hommes célèbres tels que Averoes, Maimonide, Thomas d'Aquin, Dante... Certains affirme que son Mausolé soit celui qui jouxte celui proche de Ferdowsi. 



L'Église d'Orient s'est développée également dans le Khorassan. La taille de la communauté au Vème siècle a justifié la création d'un évêché nestorien à Nishapur.

Au Vème siècle avant notre ère, l'empereur achéménide cyrrhus II s'empare de Babylone ; les juifs se dispersent en Perse et en Asie Centrale, notamment à Boukhara où ils perpétuent une religion de tradition ancienne et teintée de zoroastrisme. Ils sont alors bien implantés dans la région et actifs dans le commerce sur la route de la soie. Au début du XIXème siècle Yosef ben Moshe Mamon, juif séfarade en provenance de Tétouan au Maroc, se donne pour mission de remettre en ordre les pratiques religieuses de la communauté. Il y est encore reconnu comme un guide spirituel.



Au temps de l'invasion arabe, du fait de sa position éloignée des califats Omeyade et Abasside, le Khorassan a pu conserver une grande attractivité tout en étant éloigné du pouvoir central de Damas. Cette grande importance culturelle s'est prolongée jusqu’aux invasions du XIIIe siècle et la région a été un creuset culturel important durant plusieurs siècles.

Savants, philosophes, poètes y sont nés. Leurs travaux ont irrigué le monde de l'époque et sont parvenus jusqu'aux empires d'occident. Pour mémoire de grands scientifiques comme Ibn Sina (Avicenne), Omar Khayyâm, Al-Kharazmi (Algorythme), et de très nombreux autres dans les domaines scientifiques que ce soit les mathématiques, l’astronomie, la médecine, la physique, la géographie ./.. sont originaires du Khorassan.


Mais de manière plus prosaïque on y aussi retrouve aussi Shéhérazade et les contes des mille et une nuits qui ont fait rêver de nombreuses générations du monde entier.

Les hordes venues de la steppe ont balayé cette région détruisant d'abord puis construisant de magnifiques cités comme Samarcande, Boukhara, Merv, ..., bâties par le faroucheTimur le Boiteux (Tamerlan).




Enfin, région fréquentée depuis des millénaires par les caravanes commerçant entre l'Ociident et le lointain Orient, le Khorassan a vu passer Alexandre le Grand qui y a fondé ses premières villes à l'emplacement de foyers existants.




Matthieu et Françoise