Des rives de la Méditerranée à l'Orient, de la Turquie aux sources du Gange, en suivant d'anciennes routes commerciales, parcourues par les caravanes depuis plusieurs millénaires, c'est, autant que possible, à pied que Matthieu et Françoise dérouleront un long chemin. En 2016, le premier mouvement de cette aventure les a conduits d'Istanbul à Téhéran en traversant l'Anatolie, les rivages de la Mer Noire, la Géorgie et l'Arménie. Fin août 2017, repartant de Téhéran, ils gagnent la Mer Caspienne ; puis après un transit rapide du Turkménistan, ils rejoignent l'Ouzbekistan, Boukhara, Samarkand, traversent la Ferghana puis atteignent fin novembre 2017 Bishkek, la capitale kirghize. Début septembre 2018, ils quitteront Och au Kirghizstan pour Irkeshtam d'où ils pénétreront en Chine ; puis après la traversée de la Kunjerab Pass, ils enteront au Pakistan, puis atteindront l'Inde et continueront vers Haridwar, but de leur périple.

samedi 4 novembre 2017

Mashad, la ville sainte

Mashad, deuxième ville d'Iran après Téhéran. De grandes avenues ombragées, des parcs et, comme partout, une circulation intense. Mashad est une ville sainte pour les chiites. C'est ici qu'au IXème siècle, ´Alî ar-Ridâ (Imam Reza), le huitième Imam a été empoisonné.
La ville s'est alors développée autour de son mausolée ; elle est devenue un important lieu de pèlerinage pour tous les chiites duodécimains et, en particulier, pour l'Iran dont c'est la religion d'état depuis l'avènement des Safavides au XVIème siècle. De plus c'est le seul Imam qui soit enterré dans ce pays qui concentre le plus grand nombre de chiites.


Mashad n'était pas vraiment sur notre route mais nous ne pouvions passer au Khorassan sans la visiter. Nous y sommes allés en voiture depuis Quchan, le détour de 150 km à partir de notre chemin vers le Turkménistan nous semblant peu raisonnable à pied. À partir de Gorgan, c'est la destination que nous donnions, par simplicité, à toute personne qui nous interrogeait. À leurs yeux, nous étions des pèlerins en route vers la ville sainte et certains nous demandaient de prier pour eux sur la tombe de Reza.
C'est donc la tête et le cœur pleins de ces rencontres que nous nous sommes recueillis dans l'enceinte sacrée (mais pas sur le mausolée, car celui-ci est interdit aux non musulmans).


La ville est imprégnée de religiosité. Les rues grouillent de femmes en tchador, ombres noires glissant le long des trottoirs. On vient ici de tout le monde chiite. Libanais, bédouins de Syrie, arabes d'Irak, afghans, pakistanais, ... La ville à un côté cosmopolite qui ajoute à son charme. 


Tout le complexe de l'Imam Reza s'est développé et continue de se développer, abattant des quartiers entiers pour construire de nouvelles mosquées et médersas, minarets couverts d'or, coupoles, disposées autour d'une multitude de cours pour accueillir les millions de pèlerins qui viennent chaque année.




Notre première incursion s'est faite de nuit. L'atmosphère y est magique. Les cours sont éclairées, la lune jette une lumière blanche sur les toits.


À condition d'avoir une bonne tenue, on peut entrer dans les salles souterraines où une foule vient prier. Murs, plafonds, pilliers tapissés de mosaïques dorées, lustres en cristal, moelleux tapis sur lesquels sont réunis des familles. On prie si on veut, les enfants courent dans les allées, des groupes discutent.


Et partout des sourires à l'encontre du touriste qui déambule en tentant de se faire le plus discret possible, et plein d'empathie pour Francoise qui n'a toujours pas maîtrisé l'art de porter le tchador dans les règles.



Nous y sommes retournés le lendemain et avons été pris en charge par les "guides" du complexe, personnes charmantes au demeurant, mais qui semblent surtout avoir pour but de nous éloigner de tout ce qu'un impie ne doit pas visiter. Afin de ne pas effrayer les touristes occidentales qui pourraient rejeter le tchador noir, on leur en apporte un, sorte de sarcophage fabriqué dans un tissu "liberty", qui semble frais de premier abord mais qui rapidement se révèle être une véritable étuve.


On ne rentre pas ici habillée comme une gourgandine. Pour une femme, pas une mèche de cheveux ne doit se voir, pas plus qu'une cheville, un tchador doit emballer le tout ne laissant passer que la frimousse. Pour les hommes, bras et jambes doivent être couverts. Une police des mœurs active se charge de veiller à la bonne tenue. La fouille à l'entrée s'intéresse plus aux mèches qui dépassent qu'au contenu de notre sac ; des préposés à la morale armés de plumeaux jaunes sévissent à l'intérieur du complexe et frappent de leur moelleuse arme tout(e) contrevenant(e).


La foule se presse aux portes du mausolée où repose le corps de l'Imam Reza. Toute la journée des cercueils sont amenés devant la tombe pour assurer au mort une vie éternelle au paradis.



Le mausolée contiendrait également le corps de Haroun al Rachid, calife de Bagdad, qui régna sur la Perse pendant l'ère de la dynastie Abbasside. Pour la petite histoire, Haroun al Rachid a inspiré René Goscinny pour-soi personnage de Haroun al Poussah. Nous devons avouer que malgré une enquête diligente, nous n'avons pas vu le grand vizir Iznogoud.


Mashad est jumelée avec Compostelle.
Matthieu et Françoise